L’électricité apporterait-elle plus de revenus aux menuisiers africains ?

Benoo n’est pas là pour apporter de l’électricité à tout prix, à tous les métiers en Afrique. Dans le cas des menuisiers, l’entreprise se pose la question : l’électricité peut-elle apporter réellement plus de revenus aux menuisiers africains qui exercent en zone rurale ? Nous avons posé la question à Vincent Renaud, directeur du développement chez Benoo.

Fenêtres, portes, placards, meubles, lits, mobilier scolaire, cadres, etc. Voici tout ce que fabrique un menuisier dans un village africain. Certains des outils qu’il utilise pour travailler le bois pourraient être électrifiés comme la scie et le rabot. Ils permettraient au menuisier africain de faciliter son travail et d’être plus rapide. Il pourrait produire davantage de meubles en une seule journée, augmenter la qualité de ses meubles ou encore consacrer le temps gagné à chercher d’autres clients, par exemple.

Vincent Renaud, directeur du développement et des partenariats chez Benoo
Vincent Renaud, directeur du développement et des partenariats chez Benoo

Les clients sont-ils prêts à payer plus cher les menuisiers pour acheter des produits de meilleure qualité ?

Vincent Renaud : il est peu probable que l’augmentation des prix de vente soit acceptable. Idéalement, il faudrait même les baisser puisque le menuisier passe moins de temps en fabrication. L’augmentation de la qualité n’est pas automatique par ailleurs.

Si le menuisier augmente sa production, y aura-t-il suffisamment de demande ?

Vincent Renaud : c’est un point important, car rien ne garantit automatiquement que le marché est plus important immédiatement. Sauf à vendre plus loin que le village, ce qui pose le problème du nombre de menuisiers qui peuvent être équipés dans une zone de chalandise donnée et de la concurrence que peut créer l’électrification. La moyenne est souvent de 4 menuisiers dans des villages de 1 000 habitants, ce qui est déjà beaucoup.

S’il consacre le temps gagné à d’autres occupations, que peut-il faire ?

Vincent Renaud : c’est là un point clef, l’électrification permet de donner davantage de temps au menuisier, à la fois parce qu’elle diminue le temps de fabrication, mais aussi parce que l’éclairage, augmente le nombre d’heures actives. Ce que vont faire les artisans commerçants de ce temps n’est pas écrit à l’avance, et pas forcément lié à leur activité professionnelle. 

Combien coûte une perceuse, une scie ou un rabot électrique en Afrique ?

Vincent Renaud : le prix d’un équipement est très variable en fonction de la qualité, surtout en Afrique. La sélection d’équipements pertinents est une tâche importante pour déterminer la qualité, la disponibilité, la possibilité de réparation, etc.  Ultimement, la valeur de référence est l’amortissement, c’est-à-dire la valeur qu’il faut attribuer à l’usage d’un appareil. Sans cela, on risque fort de ne pas apporter de plus-value à l’entrepreneur.

Au bout de combien de produits vendus pourrait-il rentabiliser son investissement ?

Vincent Renaud : l’ensemble des questions classiques dans une démarche d’investissement d’entreprise est lié au marché qu’on peut espérer gagner. Un autre paramètre décisif est la disponibilité de la matière première. A bien des égards, c’est même le premier critère.

Dit autrement, si on apporte des équipements performants à un menuisier, il faut non seulement qu’il puisse vendre plus, mais aussi fabriquer davantage. Ce qui pose d’abord la question de la disponibilité du bois, puis celle du potentiel de vente des produits finis ou semi finis. 

A partir de là se pose également la question de la concurrence entre menuisiers au sein d’un territoire. Si on se base sur les chaînes de valeur agricoles et sur des initiatives présentes en Afrique de l’Ouest ou à Madagascar, il faut envisager la possibilité d’ateliers coopératifs où des artisans regroupés en association investissent ensemble pour se doter d’un outil de production performant.

Ils vont le faire si la matière première est disponible en quantité suffisante pour envisager une vente au-delà des limites du village. Où l’union permet à chacun de prospérer davantage.

Dans une optique de vente ou location de petit matériel, le gain est à ce stade limité au temps gagné et la possibilité pour un menuisier de faire autre chose de ses journées, notamment d’aller aux champs dans un écosystème villageois, ou de mobiliser moins de main d’œuvre (apprentis) pour produire autant. Le critère de décision est donc autant lié à la personne et à son confort qu’à une logique de développement de l’entreprise.

 

En savoir plus l’électrification rurale en Afrique de Benoo.

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